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Mort de Sihem Belouahmia : la preuve d’une justice déconnectée de la réalité


La Jeune Sihem Belouahmia était portée disparue depuis le 26 janvier 2023. Le principal suspect serait passé aux aveux, début février, durant sa garde à vue. Selon sa première version, il aurait tué la jeune fille, suite à une dispute amoureuse. Le mobile du crime reste encore à déterminer avec certitude, puisque l’enquête est en cours.



Mahfoud H., un personnage connu des services de Police, condamné à de multiples reprises par la justice, aurait reconnu être l’auteur du meurtre (ou de l’assassinat) de la lycéenne de 18 ans, Sihem Belouahmia.



Avis du Messager souhaite, ici, apporter un autre angle à cette affaire, et se questionner sur la responsabilité de la justice pénale française qui connaissait parfaitement « le pédigrée » de l’individu. En effet, celui-ci, semble-t-il, était aussi sous le coup d’un contrôle judiciaire et devait, d’ailleurs comparaitre devant la justice pour une autre affaire, et ce, peu de temps avant qu’il ne commette son crime odieux. Au surplus, le rapport d’expertise psychiatrique de Mahfoud H. que détenait déjà l’autorité judiciaire laisse apparaitre un profil très inquiétant, pour ne pas dire alarmant.


La question qui nous intéresse, ici, est de savoir, comment un individu d’une pareille dangerosité pouvait tranquillement vaquer à ses occupations malhonnêtes, en attendant son ou ses jugements. Allant même jusqu’à exercer son emprise sur une adolescente de 18 ans, alors qu’il en a lui-même 39, soit plus de 20 ans d’écart d’âge. S’extraire d’une telle emprise, paraissait impossible. La jeune Sihem Belouahmia semble avoir été prise au piège. Sa volonté d’en sortir lui coutera la vie.


Petit rappel, sur le fonctionnement de notre système judiciaire.


En France, le principe est celui de la présomption d’innocence. Cela signifie que tant qu’un individu n’a pas été jugé coupable par une juridiction de jugement, celui-ci est présumé innocent, de sorte qu’il est libre de vaquer à ses occupations, et ce, jusqu’au jour où la justice trouvera le temps de le juger. La preuve de la lenteur de notre justice n’est plus à faire. Cette lenteur s’est accentuée avec la crise sanitaire de la COVID-19, depuis mars 2020.



Alors que se passe-t-il lorsqu’une enquête (ou une information judiciaire) est terminée et qu’un individu a été identifié comme l’auteur des faits qui ont donné lieu à l’enquête ?


Les juges ont alors deux possibilités, soit, le placer en détention provisoire (lorsque la peine encourue est supérieure à 3 ans), soit, le placer sous contrôle judiciaire.


Dans la première hypothèse, le juge (juge des libertés et de la détention, plus connu sous le nom de JLD) devra motiver sa décision de placement en détention provisoire (risques : de fuite, de pression sur la victime ou sur les témoins etc…), dans la seconde, il se contentera de déterminer une liste d’obligations que le mis en cause devra respecter, sous peine d’aller en prison (pointage au commissariat, interdiction de s’approcher de la victime ou des témoins, obligation de soins etc…).


Ainsi, selon l’article 144 du code de procédure pénale :


« La détention provisoire ne peut être ordonnée ou prolongée que s'il est démontré, au regard des éléments précis et circonstanciés résultant de la procédure, qu'elle constitue l'unique moyen de parvenir à l'un ou plusieurs des objectifs suivants et que ceux-ci ne sauraient être atteints en cas de placement sous contrôle judiciaire ou d'assignation à résidence avec surveillance électronique :

1° Conserver les preuves ou les indices matériels qui sont nécessaires à la manifestation de la vérité ;

2° Empêcher une pression sur les témoins ou les victimes ainsi que sur leur famille ;

3° Empêcher une concertation frauduleuse entre la personne mise en examen et ses coauteurs ou complices ;

4° Protéger la personne mise en examen ;

5° Garantir le maintien de la personne mise en examen à la disposition de la justice ;

6° Mettre fin à l'infraction ou prévenir son renouvellement ;

7° Mettre fin au trouble exceptionnel et persistant à l'ordre public provoqué par la gravité de l'infraction, les circonstances de sa commission ou l'importance du préjudice qu'elle a causé. Ce trouble ne peut résulter du seul retentissement médiatique de l'affaire. Toutefois, le présent alinéa n'est pas applicable en matière correctionnelle. »


En droit pénal français, le principe est que la détention provisoire doit être l’exception et la liberté le principe. La détention doit être « l’unique moyen… ».


Il ne s’agit pas ici de remettre en cause le principe de la présomption d’innocence qui est le gage d’une démocratie juste et moderne ; mais le but est de voir quels pourraient être les axes d’amélioration, pour éviter que la mise en œuvre de ce beau principe n’entraine des situations tragiques, comme celle que nous examinons dans la présente note.


En effet, « là où le bât blesse », c’est lorsque le mis en cause laisse apparaitre ouvertement un profil particulièrement dangereux, compte tenu, soit de la gravité de son acte, soit de son appétence pour les crimes et/ou les délits.


C’est ainsi que se trouvent actuellement en liberté des personnes qui sont en attente de leur jugement et qui poursuivent leurs activités délictuelles et/ou criminelles.


Quid alors de la responsabilité de la justice, lorsque de par sa lenteur, de par sa négligence ou de par son laxisme, un individu dangereux commet une autre infraction, parfois plus grave que la première.

C’est exactement, ce cas de figure que nous propose l’affaire de la Jeune Sihem Belouahmia.


Cette malheureuse a croisé le chemin de Mahfoud H., certes, un proche de sa famille, mais qui était, tout de même sous contrôle judiciaire, c’est-à-dire, normalement, sous la surveillance de la justice.


Et que l’on ne nous dise pas que la jeune victime est responsable de ses fréquentations ou qu’elle a eu un comportement inapproprié, car la question ne se trouve pas là.


Comment accepter, par exemple, qu’un membre de sa famille ou un proche soit la victime d’un viol commis par un individu qui attendait tranquillement son procès, pour une autre agression, et que vous apprenez que celui-ci, initialement placé en détention provisoire a été remis en liberté, parce qu’il a reconnu les faits et qu’il lui a juste été notifié qu’il ne devra pas s’approcher de sa première victime et qu’il devra simplement se rendre au commissariat de police du lieu de sa résidence, une fois par semaine ?


C’est la question de l’efficacité de la justice à rendre la Justice qui se pose ici ; son efficacité à traiter en temps réel (et correctement) les délits et crimes qui lui sont soumis et à déterminer les profils inquiétants pour prévenir toute autre infraction.


Il appartient à l’État et à son système judiciaire de s’interroger sur un régime mieux adapté, qui ne porterait pas atteinte au principe de la présomption d’innocence, mais qui tiendrait, tout de même, compte du profil du mis en cause.

Il s’agira alors d’agir au cas par cas, car ne l’oublions pas, si « vendetta » il n’y a pas, c’est bien parce que nous avons délégué le pouvoir de répression à notre justice. La justice doit donc nous rendre des comptes, car c’est pour nous qu’elle a été instaurée et c’est de nous qu’elle tire sa légitimité !

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